(…) La vibration dramatique et émouvante de l’espoir et de l’échec, de l’élévation et de la chute, de la vie et de la mort, de l’existence et du néant, passe à travers les matières de formes tendues à l’extrême, sensuellement caressées ou fébrilement modelées et malaxées. Sur des espaces créés, socles massifs, rugueux, abrupts, hauts, ou bases étalées et plages incertaines, lieux qui les distinguent et qui les sacralisent, les idoles féminines prométhéennes de Catherine Fourniau se dressent comme autant de fétiches indifférents mais sans résignation, comme des victoires aptères, humiliées mais pourtant victorieuses de surgir ainsi à l’acmé de l’expression. (…)
Des sarcophages compacts, affleurant archéologiquement de leur gangue terreuse sur un bois immémorial, incarnent, comme le montrent les dessins préparatoires des corps tronqués où se conjuguent la poussée organique de la vie et l’ensevelissement de cette vie retournant au néant opaque de la matière sans conscience (…).
(...) Sur des aires d’errance vide se tétanisent des conversations aphones et des rencontres de solitudes totémiques, présences énigmatiques qui nous interpellent par leur impassibilité que notre sentiment vivifie ou par leur dynamique qui capture notre sensibilité à l’apogée de son émoi. (…)
Par le jeu des matériaux combinés ou du bronze et du plâtre, et par le jeu des compositions complexes de formes pourtant homogènes, Catherine Fourniau exprime la contradiction de l’émergence et de l’épuisement, voire de la décomposition et de la destruction, l’ambiguïté interrogative de la présence muette et de la solitude en quête, l’inéluctable communion de la vie et de la mort, du réel et de l’idéal.
L’œuvre de Catherine Fourniau nous avertit que la veine figurative et expressive de Rodin, Germaine Richier, Giacometti ou Martine Boisleau est loin d’être tarie et dépassée. Elle nous fait penser aux doutes existentiels comparables de poètes comme René Char, Francis Ponge, Jean Tardieu ou Yves Bonnefoi, et nous apparaît comme un poème plastique de l’idéal humaniste et la fissure vivifiante où l’expression se glisse entre le réel éprouvé et l’esprit qui l’assume quand même.